Archives quotidiennes : 13 mars 2020

Chauffeurs VTC des plateformes et Contrat de travail

Par un deuxième arrêt relatif à la nature du contrat liant un travailleur à une plateforme numérique, la Cour de cassation confirme sa position dans une affaire concernant un chauffeur VTC de la plateforme Uber, en reconnaissant un contrat de travail si l’existence d’un lien de subordination est établie.

Pour mémoire, selon l’article L 8221-6 du Code du travail, les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des Urssaf pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales sont présumées ne pas être liées avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation.

Cependant L’existence d’un contrat de travail peut être établie lorsque ces personnes fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.

Dans la situation de l’espèce, un chauffeur avait signé un contrat de partenariat avec   Uber, utilisait la plateforme numérique et une application permettant la mise en relation avec des clients, en vue d’un transport urbain.

Dans ce contexte, la Cour de Cassation :

-rappelle que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné et que le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice de subordination lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution

-approuve la cour d’appel d’avoir requalifié la relation de travail liant le chauffeur à la société en contrat de travail.

La note explicative relative à l’arrêt précise que l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle.

A retenir les éléments relevés par la Cour de cassation pour caractériser l’existence d’un lien de subordination:

– le chauffeur avait intégré un service de prestation de transport créé et entièrement organisé par la société qui n’existe que grâce à la plateforme et à travers l’utilisation duquel il ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni les conditions d’exercice de sa prestation de transport, entièrement régis par la société ;

– les tarifs étaient contractuellement fixés au moyen des algorithmes de la plateforme par un mécanisme prédictif imposant au chauffeur un itinéraire particulier dont il n’avait pas le choix et pour lequel des corrections tarifaires étaient appliquées s’il suivait un itinéraire inefficace ;

– le chauffeur ne connaissait parfois pas la destination de la course et il ne pouvait pas réellement choisir librement, comme l’aurait fait un chauffeur indépendant, la course lui convenant ou non ;

– il pouvait être déconnecté temporairement de l’application à partir de 3 refus de courses et perdre l’accès à son compte en cas de dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou à l’application en cas de signalements de comportements problématiques par les utilisateurs, peu important que les faits reprochés soient constitués ou que leur sanction soit proportionnée à leur commission.

Il ressortait de l’ensemble de ces éléments que la société avait adressé des directives au chauffeur, en avait contrôlé l’exécution et avait exercé un pouvoir de sanction; ce ci justifiant le constat d’existence d’un lien de subordination, et donc d’un contrat de travail, entre le chauffeur et la société,le statut de travailleur indépendant étant fictif.

Il s’agit donc des principes déjà adoptés la Cour de cassation dans l’arrêt du 28 11 2018 dans l’affaire Take Eat Easy (Cass. soc. 28-11-2018 n° 17-20.079 )

Pour en savoir plus : Cass. soc. 4-3-2020 n° 19-13.316 FP-PBRI

https://www.efl.fr/actualites/social/controle-conflits-du-travail/details.html?ref=f66d94248-dc61-4664-9056-1dafbfec536b&eflNetwaveEmail

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/notes_explicatives_7002/relative_arret_44525.html

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