L’abandon de poste est apparu dans le débat sur le projet de loi Marché du travail lors de l’examen du texte en commission des affaires sociale : les propositions de réforme permettraient-elles de mettre fin à cette pratique ?
Abandon de poste et différence avec situations connexes. L’abandon de poste n’est pas défini par la loi : il s’agit de toute absence injustifiée et prolongée ou répétée d’un salarié, sachant qu’il faut le distinguer de plusieurs situations :
–arrêt maladie justifié qui n’est pas justifié dans les 48 heures, comme le prévoit la loi, mais plus tardivement ;
–droit de retrait qui, en général n’est pas prolongé, et doit respecter une procédure et être justifié par un danger grave et imminent formellement identifié (à défaut il s’agirait d’une absence injustifiée) ; –prise d’acte d’un salarié qui invoque le non-respect par l’employeur de ses obligations essentielles en demandant au juge que le contrat de travail soit rompu aux torts de l’employeur. La prise d’acte peut être justifiée alors que l’abandon de poste est une inexécution fautive de son contrat de travail par le salarié ; –demande de résiliation judiciaire par le salarié ;
–démission qui n’a pas à être justifiée, ne se présume pas selon le droit positif actuel et doit être expresse et non équivoque.
Que peut faire l’employeur face à l’abandon de poste ? La seule issue à l’abandon de poste est le licenciement, à défaut, le contrat de travail se poursuit. L’employeur cesse de payer le salarié mais ce dernier reste pris en compte dans les effectifs de l’entreprise. L’abandon de poste constitue par hypothèse une faute du salarié et, bien souvent, une faute grave car, par définition, il rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. L’employeur, en cas de faute grave, n’a pas à verser d’indemnités de licenciement et de préavis.
L’employeur doit agir rapidement ; en pratique, d’attendre trois jours ouvrés, le temps de voir si le salarié adresse une justification d’absence valable. Sinon, il faut envoyer au salarié une mise en demeure par LRAR, éventuellement, la doubler d’un email. Par ce courrier, l’employeur demande au salarié, soit de lui adresser une justification d’absence, soit de se représenter à son poste dans un délai de 2 jours à une semaine à compter de la réception de la mise en demeure. Si le salarié fait parvenir une justification valable à l’employeur, il ne s’agit pas d’un abandon de poste, le salarié pouvant éventuellement être sanctionné pour n’avoir pas transmis un justificatif d’absence dans les délais. Un licenciement serait disproportionné pour un salarié ayant une certaine ancienneté et n’ayant jamais commis antérieurement une telle faute. Si le salarié ne répond à la mise en demeure de l’employeur, ne procédure de licenciement pour faute grave peut être engagée.
Quid des réformes annoncées dans le cadre du projet de loi sur le marché du travail ? Un premier amendement prévoyait que l’abandon de poste ne serait plus considéré comme une privation involontaire d’emploi. Un second – suite au retrait du premier – vise à créer une présomption simple de démission en cas d’abandon de poste.
Le premier amendement visait à redéfinir la privation involontaire d’emploi dont serait exclu l’abandon de poste, le salarié ne percevant alors pas d’allocations chômage. Le second prévoit que le salarié qui abandonne son poste et, après une mise en demeure de l’employeur restée sans réponse, est présumé démissionnaire, ce qui constitue une exception au principe selon lequel la démission ne se présume pas. L’employeur n’aurait plus à licencier un salarié en abandon de poste car celui-ci serait considéré, sous le contrôle du juge, comme démissionnaire et n’aurait donc pas le droit à des allocations chômage.
L’abandon de poste deviendrait une sorte de « prise d’acte bis » pour le salarié qui pourra saisir le conseil de prud’hommes afin d’inverser la présomption simple de démission ; le juge devant statuer dans le délai d’un mois, délai déjà applicable à la prise d’acte.