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Vers un « droit souple du travail »

La Direction générale du travail a rédigé une note suite à 2 décisions du Conseil d’Etat relatives au développement d’un droit « souple » du travail, regroupant questions-réponses, fiches, guides, code du travail numérique, tous ces outils s’étant récemment fortement multipliés.

Cependant la portée juridique de ces textes soulève des interrogations, le Conseil d’Etat,  distinguant ceux de ces documents qui peuvent faire grief et les autres. Le risque est de voir apparaître un nouveau contentieux. 

La Direction générale du travail analyse 2 points : ces documents  peuvent-ils être contestés devant le juge administratif, ou être invoqués devant le juge judiciaire ?

Dans une décision du 29 mai 2020, le Conseil d’Etat a traité la légalité des guides de bonnes pratiques des organisations professionnelles et des fiches du ministère du travail dans la lutte contre le Covid-19.

*Pour les premiers, il a retenu que bien que mis en ligne sur le site du ministère du travail, ces guides sectoriels ne sont pas des actes administratifs susceptibles de faire grief : ils ne peuvent pas faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif.

*Pour les fiches métiers rédigées par le ministère du travail, la contestation pourrait être possible. Le Conseil d’Etat n’a pas eu à se prononcer expressément sur leur légalité car les recommandations contestées avaient été modifiées et mises en conformité: sur le principe, le Conseil d’Etat admet être compétent pour apprécier leur légalité.

La décision du 12 juin 2020 confirme cette possibilité: le Conseil d’Etat édicte un principe général sur ces actes de droit souple:  « Les documents de portée générale émanant d’autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en oeuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices ». 

La note de la Direction générale du travail expose les précautions à prendre par l’administration au regard de cette nouvelle jurisprudence. La DGT prend acte du fait que « les recommandations et prises de position de l’administration sont désormais susceptibles de recours (…) Le Conseil d’Etat a implicitement admis la recevabilité du recours formé contre les guides et fiches-conseils établis par le ministère du travail et définissant de bonnes pratiques pour éviter les contaminations dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 ».

La DGT appelle à la plus grande vigilance s’agissant des éventuelles publications des Direccte relatives à des prises de position. Pour l’application de ces documents par l’administration, elle met aussi en garde les agents contre une application trop systématique de ces règles de droit souple : l’administration n’est pas liée par ces règles, et ne dispense pas d’un examen individuel des situations à traiter.

En matière de contrôle, la DGT rappelle les dispositions relatives au droit à l’erreur de l’employeur dès lors qu’il est de bonne foi. « En pratique, la bonne foi peut être établie lorsque le comportement de l’employeur est certes non conforme au code du travail mais fondé sur des informations erronées données par l’administration elle-mêmel. L’administration est susceptible de voir sa responsabilité engagée si elle fournit des informations erronées aux usagers et doit indemniser les préjudices qui présentent un lien direct et certain avec cette faute ».

A propos de l’invocation du droit souple du travail lors d’un contentieux judiciaire,  la DGT souligne qu’en droit du travail, « les recommandations de bonnes pratiques émises et diffusées par le ministère du travail (fiches-conseils, guides-métier, questions-réponses, modèles de documents ou d’actes …) dès lors qu’elles sont de nature à influencer ou orienter les comportements dans un sens déterminé peuvent être mises en débat devant le juge judiciaire, notamment à l’occasion d’une action en responsabilité.

Sur la crise sanitaire actuelle, la DGT précise « qu’en matière de santé et sécurité au travail au regard du risque de contamination au Covid-19, le respect par l’employeur des préconisations émises sur le site du ministère du travail auront une incidence sur l’appréciation du manquement ou non à son obligation de sécurité tirée de l’article L.4121-1 du code du travail ». Mais « le contrôle de la faute par le juge judiciaire s’effectuant in concreto, la seule preuve du respect/non-respect formel des recommandations ministérielles ne suffira pas à engager la responsabilité de l’auteur ou au contraire à l’en exonérer, si d’autres éléments de droit et de faits doivent être retenus ».

Quelle portée de ces décisions sur le code du travail numérique ? Le code du travail numérique regroupe l’ensemble des informations utiles aux entreprises et aux salariés diffusées sur le site du ministère du travail. Une page est dédiée au Covid-19.dont l’objet est de faciliter l’accès au droit du travail. Le fait pour l’employeur ou le salarié de se prévaloir du code du travail numérique n’est pas sans incidence. « L’employeur ou le salarié qui se prévaut des informations obtenues au moyen du code du travail numérique est, en cas de litige, présumé de bonne foi ». La DGT estime que « lors de l’appréciation d’un éventuel manquement dans les relations de travail, la bonne foi, toujours présumée en droit contractuel, sera d’autant plus caractérisée que les recommandations ministérielles auront été respectées et inversement moins facilement retenue si elles ne l’ont pas été ».

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