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 Les Assises du Travail : vers une refondation du rapport au travail », janvier 2023.

En s’appuyant sur l’approche de Jean-Daniel Reynaud, on peut modéliser le fonctionnement de toute organisation par trois boucles de régulation,  plus ou moins formelles, qui interagissent et constituent son mode de régulation sociale : Le dialogue managérial, Le dialogue social, Le dialogue professionnel

1 – Le dialogue managérial: régulation régalienne et collaborative: La ligne managériale est à la fois descendante (régalienne) pour transmettre les consignes, les prescriptions du travail et ascendante (collaborative) pour faire «remonter  les éléments d’ambiance (climat social), les diagnostics, les idées, de la part des collaborateurs ou des parties prenantes, les clients … : les organisations pyramidales fonctionnant sur le « command & control » ne sont plus adaptées, ni à la société de la connaissance ni à l’environnement volatile, incertain, complexe, ambigu, qui caractérise les environnements de travail d’aujourd’hui.

La demande de flexibilité est très large : lieux de travail, possibilités de maîtriser l’ordonnancement de ses tâches, respiration recherchée sur la journée de travail et sur la vie professionnelle. Derrière cette demande de flexibilité, il y a la question de la banque des temps ou du compte épargne temps universel.

Un autre facteur explicatif est la mauvaise qualité des conditions de travail. Redonner Du sens au travail, une aspiration révolutionnaire a posé pour hypothèse que les difficultés de recrutement et la démotivation proviennent pour l’essentiel des conditions de travail dégradées, que des hausses de salaire ne suffiraient plus à compenser .

La boucle de régulation managériale joue un rôle essentiel: pour mémoire le rapport « Bien être et efficacité au travail », février 2010, Muriel Pénicaud, Henri Lachmann, et  Christian Larose proposant 10 mesures concrètes impliquant fortement les managers de proximité..La France a peu progressé ces dernières années sur le front de la santé au travail. CF  Le Comptoir de Malakoff Humanis :« La France, mauvaise élève de l’Europe en santé au travail », juillet 2022) et Catherine Pinchaut, CFDT, rappelant que l’ANI du 9 décembre 2020 a acté la  QVCT, et la nécessité de s’intéresser à la « qualité de vie et aux conditions de travail  ».

S’ajoute également les conditions de travail et la pénibilité, c’est-à-dire la fatigue organisationnelle non liée à l’effort physique, mais aux changements incessants, mal préparés, non concertés, qui s’imposent aux salariés. La contrainte de reconnexion permanente du travail est un effort invisible pour le management : la régulation managériale peine à apporter des réponses .

2 – Le dialogue social, régulation institutionnelle : La table ronde sur le dialogue social et la démocratie au travail ouverte par Jean-François Pilliard, co-président du Comité d’évaluation des ordonnances Travail, a conclu que cinq ans après leur mise en place, les ordonnances travail n’ont pas eu les effets attendus en matière de dialogue social en entreprise. La fusion des IRP a permis de faire le lien entre les aspects économiques et le travail mais «  au prix d’une centralisation très excessive du dialogue social caractérisée par une perte de proximité, qui accroît la difficulté à capter le réel du travail ».

Peu d’entreprises ont mis en place des représentants dits « de proximité » (Management & RSE : « Face à face sur la nouvelle représentation des salariés », décembre 2017). Il faut envisager des incitations plus fortes ainsi qu’une diminution du seuil de création des Commissions santé, sécurité et conditions de travail.

Plusieurs intervenants aux Assises ont alerté sur la nécessité d’éviter la « Gilet-jaunisation » du dialogue social ..La CFTC fait remarquer qu’on a beaucoup trop centralisé les IRP à l’occasion des ordonnances Travail de 2017, alors qu’il est absolument nécessaire de recréer de la proximité. Catherine Pinchaut, CFDT, préconise d’abaisser le seuil de création des CSSCT.

3 – Le dialogue professionnel, régulation professionnelle : Poursuivant la réflexion sur le dialogue social, Jean-François Pilliard a insisté sur l’importance du diagnostic partagé et sur l’accent obsessionnel placé sur la compétitivité coûts, alors que nous sous-exploitons la compétitivité hors-coûts et les opportunités qu’elle recèle. « Transition managériale : heurts et malheurs français », mars 2014.

Catherine Pinchaut, CFDT, a rappelé les conclusions de la grande enquête « Parlons travail » réalisée en 2017, ainsi que les opportunités apportées par l’approche du dialogue professionnel : 72 % des répondants aimeraient participer davantage aux décisions qui affectent leur entreprise ou administration, mais 31 % affirment ne pas pouvoir parler librement sur leur lieu de travail. De même, 84 % aspirent à des entreprises et administrations davantage démocratiques. L’enquête révèle aussi que les travailleurs qui souffrent au travail sont ceux qui disent ne pas avoir assez d’espace pour s’exprimer ou pour s’organiser.

Le dialogue professionnel, parfois appelé « expression directe des salariés »a été initialement conçu de façon réactive, comme un outil de lutte contre les risques psychosociaux. Bien que recommandé par l’ANI QVT de 2013, il n’a pas véritablement percé : il faut généraliser la démarche pour en faire aussi un outil d’innovation sociale et en améliorer l’attractivité et l’efficacité, au service de la performance globale.

Dans un environnement volatile et incertain, le défi pour les organisations est de passer d’un système de prescription du travail à un système d’implication ; c’est-à-dire du travail comme contrainte au travail comme ressource. Cette transition nécessite une ingénierie du travail : co-construction du sens du travaiL, utilisation accompagnée des technologies pour favoriser les échanges, animation d’espaces de discussion sur le travail, soutien managérial, régulation sociale enrichie…

En conclusion, le propos de conclusion de Sophie Thiéry, directrice de l’engagement sociétal chez AÉSIO :  « Il n’y aura pas de plein emploi sans une action déterminée sur le sens et la qualité du travail ».

Pour en savoir plus :https://www.metiseurope.eu/2023/01/23/les-assises-du-travail-vers-une-refondation-du-rapport-au-travail/

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Travail à distance et relation managériale

Résultats de l’enquête #Montravailàdistance, Jenparle ! lancée par Res publica en partenariat avec la CFDTTerra Nova, Metis Europe, Liaisons sociales magazine et Management&RSE :

* 76 % des managers considèrent que le travail à distance a des effets positifs  sur la confiance qu’ils ont dans leurs collaborateurs.

* 66 % des collaborateurs pensent que le travail à distance a des effets positifs sur la confiance qu’ils ont dans leurs managers.

De nombreux témoignages montrent que les personnes qui n’y croyaient pas avant, sont bien obligées de constater que cela fonctionne.

Question posée aux managers si, du fait du travail à distance, ils avaient le sentiment qu’il est plus ou moins facile de déléguer des responsabilités à leurs collaborateurs, de contrôler ou de programmer le travail de leur équipe. Réponse claire : il est plus difficile de programmer (plus difficile 23%) et de contrôler le travail à distance (22%), mais il est plus facile de déléguer des responsabilités (51%)…

* 51 % des managers organisent plus souvent des temps d’échange en équipe avec leurs collaborateurs (19 % en organisent moins) : l’accroissement des temps d’échanges ne rend pas plus facile la programmation ni le contrôle du travail.

* 52 % des managers  déclarent que la mise en place du travail à distance les a conduits à revoir à la baisse leurs objectifs vis-à-vis de leurs collaborateurs.

*Selon les témoignages recueillis, les comportements vis-à-vis des équipes évoluent : ne pas s’énerver en cas de non-respect d’un délai, ne pas penser que la personne ne fait rien, faire attention aux mots employés (force des mots par rapport à l’oral, s’adapter aux rythmes et contraintes de chacun, utiliser différents canaux pour communiquer: mails, appels, SMS, Whatsapp, conf call …

*Les managers prennent le temps de prendre des nouvelles avec  le sentiment d’être plus en soutien et en animation d’équipe.

Ces éléments montrent que le travail à distance porte les prémices d’une transformation des relations hiérarchiques et peut-être plus généralement des relations de travail : un essai  à transformer.

3 conditions à réunir pour que le management passe durablement d’une logique de « command and control » à une logique de soutien, d’animation et d’intelligence collective :

1-preuve de bienveillance dans les relations de travail : attention aux autres et  compréhension des situations individuelles, éléments clés de la posture managériale.

2- reconnaissance de la contribution de chacun à l’œuvre collective dans le cadre du travail : 58 % des répondants souhaitent travailler davantage à distance et 35% demandent plus de  capacité à prendre des décisions et plus d’autonomie.

3- dialogue et pas seulement  dialogue social mais dialogue professionnel, c’est à dire dialogue collaboratif, dialogue informel pour inscrire dans la durée les transformations du management et faciliter de nouvelles relations de travail . Tout ceci dépendra pour une grande partie de la capacité des entreprises à tirer les meilleurs enseignements des expériences vécues dans la période de crise sanitaire.

Pour en savoir plus : https://www.metiseurope.eu/2020/05/04/travail-a-distance-transformer-lessai/

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