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Procès France Telecom: jugement du 20 décembre 2019

En synthèse, le points essentiels du jugement rendu le 20 décembre 2019 dans le procès France-Telecom :

*Reconnaissance de culpabilité : France Télécom et 3 anciens dirigeants  (ex-pdg, ex-numéro 2, et ex-drh)  ont été déclarés coupables de « harcèlement moral institutionnel » pour la période 2007-2008, marquée par différents suicides de salariés; leur relaxe a été prononcée pour la période 2008/2010.

*Condamnation : 1 an de prison dont huit avec sursis + 15 000 euros d’amende pour les ex-dirigeants; 75 000 euros d’amende, (peine maximale) pour l’entreprise.

Les  4 autres prévenus ont été reconnus coupables de complicité de harcèlement mora et condamnés à 4 mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende.

Tous sont également condamnés à verser solidairement 3 millions d’euros de dommages et intérêts à l’ensemble des parties civiles.

*Motivation : à propos de l’objectif poursuivi et la méthode appliquée,  le tribunal a relevé :

-une politique de gestion des ressources humaines déterminée et menée au plus haut niveau de l’entreprise: choix d’une politique de déflation des effectifs à marche forcée »déployée avec urgence, accélération et primauté des départs de l’entreprise, de gré ou de force.

-des pratiques contribuant à un climat délétère, en dépit des alertes exprimées dès 2007 sous diverses formes et par différents observateurs  dont les partenaires sociaux avec persistance de la direction dans son objectif imposé de réduction des effectifs et a maintenu et le recours à des méthodes de déstabilisation des personnels:  l’application du plan Next et du programme ACT caractérisant une une politique délibérément attentatoire aux droits et à la dignité des employés et à leur santé physique ou mentale.

A retenirla notion de « harcèlement institutionnel » est reconnue pour la première fois, le tribunal retenant :

-la pression donnée au contrôle des départs dans le suivi des effectifs à tous les niveaux de la hiérarchiques  avec l’instrumentalisation de dispositifs managériaux subie et mise en œuvre par la hiérarchie intermédiaire.

-l’instauration d’un climat anxiogène par le programme « Time to move », les personnes craignant de ne pas pouvoir trouver de postes ou de ne pas pouvoir s’adapter à leur nouvelle mission.

-une rémunération variable d’un certain nombre de cadres indexée sur la baisse des effectifs de leurs unités.

– le conditionnement des esprits des managers au succès de l’objectif de déflation lors de conventions annuelles des cadres supérieurs qui devaient coûte que coûte, atteindre l’objectif des 22 000 départs, tout ce ci contribuant à une dégradation des conditions de travail …

A souligner que le très volumineux jugement (345 pages) précise qu’il  ne s’agit pas de critiquer les choix stratégiques d’un chef d’entreprise, notamment celui d’une politique de déflation des effectifs dès lors qu’elle demeure respectueuse du cadre légal.

D’ores et déjà, l’avocat de l’ex-pdg a déclaré faire appel du jugement tandis qu’Orange a indiqué ne pas utiliser cette voie de recours.

Pour en savoir plus :

https://www.actuel-rh.fr/content/france-telecom-condamne-pour-harcelement-moral-institutionnel

https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/12/20/le-tribunal-rend-son-jugement-dans-le-proces-inedit-de-france-telecom_6023561_3224.html

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Procès France Télécom : délibéré à venir le 20 décembre 2019

Les juges du tribunal de grande instance de Paris auront à répondre à la question de savoir s’il est possible de condamner pénalement un harcèlement moral managérial, institutionnalisé ?

La présidente de la 31e chambre correctionnelle du tribunal de Paris a clos le 11 juillet dernier les débats des 46 audiences du procès France Télécom ; au cours de plus de deux mois, le tribunal a écouté et essayé de comprendre avant de décider.

Au cours des deux dernières journées, les avocats de la défense ont plaidé la relaxe pour les 3 principaux prévenus, accusés de harcèlement moral : l’ancien PDG, l’ex-directeur des opérations et l’ex-directeur des ressources humaines autour d’une question majeure : la loi permet-elle de poursuivre et condamné pour harcèlement moral managérial, institutionnel, sur la base de l’article 222-33-2 du code pénal ?

La procureure avait pour sa part estimé dans son réquisitoire que l’évolution du droit permet de reconnaître l’infraction pénale de harcèlement managérial.

La défense a fondé son argumentaire sur le principe « pas de peine, pas de délit sans loi selon le principe de légalité des peines; or le législateur n’a pas créé ce délit » et soutenu l’absence d’agissements positifs et par voie de conséquence l’absence de lien de causalité entre agissements et dégradation des conditions de travail ayant  a pu mener jusqu’au suicide. Egalement plaidé le fait que la souffrance au travail serait de la faute à l’évolution technologique et à l’arrivée du numérique, et donc du ressort du politique, pas de la justice.

Pour conclure, la Présidente du tribunal a indiqué que « les juges emportaient un lourd fardeau dans leur délibéré, sachant que l’émotion n’est pas bonne conseillère et que ce n’est pas le droit » »

En attente du verdict le 20 décembre.

Pour en savoir plus : https://www.elegia.fr/actualites/sante-securite/proces-france-telecom-tribunal-voulait-comprendre-cet-objectif-est-atteint?tracking-id=W19164_NewsletterSANTESECU&utm_source

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Procès France Télécom : témoignages autour du rôle des services rh…

Selon le témoignage d’une sociologue ayant participé à une enquête de Technologia sur les conditions de travail, a mis en avant les conclusions établies faisant ressortir une enquête hors norme qui a donné l’occasion à un nombre inégalé de salariés d’exprimer une souffrance rarement atteinte.

Cette enquête ayant fait intervenir 30 consultants, a permis à 80 000 salariés de s’exprimer sur leurs conditions de travail. Les propos recueillis ont traduit une souffrance d’une grande ampleur  ayant conduit à mettre en place une procédure d’écoute psychologique pour les consultants.

La sociologue rappelant la particularité de France Télécom qui incarnait l’un des fleurons technologiques français a souligné plusieurs points :

*à l’origine les salariés adhéraient aux discours des dirigeants en considérant les changements comme nécessaires au regard de la réduction de la dette et le virage technologique.

*malgré les efforts consentis, les exigences étaient toujours plus fortes : changements de métiers, d’activités, de lieux d’exercice…

*l’objectif de 22 000 départs et de mobilité forcée, prévu au programme Act, a entrainé un climat de peur et provoqué une remise en cause de soi et le sentiment de ne pas être à la hauteur.

Par ailleurs a été relevé le fait que la prévention n’avait pas fonctionné en mettant en cause les services des ressources humaines à plusieurs titres :

-la défaillance dans le rôle de régulateur et de préventeur de la santé.

-la restructuration des services rh , facteur de fragilité

-l’insuffisance de la formation mettant les salariés en difficulté pour réaliser leurs tâches.

-la rémunération a été perçue comme peu élevée et les possibilités d’évolution très réduites.

Le management non gestionnaire est également souligné : manque de soutien de la hiérarchie, fonctionnement centré sur les objectifs à atteindre et non sur la manière de les atteindre, pratiques d’humiliations et de placardisation.

Du côté des prévenus, la pertinence de  l’étude a été critiquée sur certains points, notamment en ce qui concerne l’affaiblissement des collectifs de travail ; a été également mis en avant le fait que le rapport Technologia avait servi à la mise en place d’un plan d’action.

A suivre la fin des audiences  prévue pour le 12 juillet.

Pour en savoir plus : https://www.actuel-rh.fr/content/proces-france-telecom-les-rh-nont-pas-joue-un-role-de-regulateur-et-de-preventeur-de-la

 

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Procès France Télécom : des témoignages en direct de l’audience …

2 témoignages lors de l’audience du 14 mai éclairent le dossier …

*Jacques de Larosière, administrateur indépendant  a défendu la vision stratégique de l’ex-PDG de l’entreprise en estimant que la situation de l’entreprise était critique en 2002 en frôlant la faillite, ce qui justifiait les suppressions d’emploi et une réorganisation importante avec le plan Next lancé en 2005 ; selon lui, l’objectif était de changer une ancienne administration en une entreprise ultra moderne du monde des télécoms, ce qui a généré du stress sans pour autant créer une crise sociale.

*Hélène Adam, administratrice salariée, membre du CHSCT de 1989 à 2000 et aujourd’hui  membre du Cese, a  critiqué les positions des marchés financiers et le dispositif de management instauré. Elle a rappelé avoir fait de multiples alertes mettant en avant des conséquences catastrophiques et l’incompréhension du personnel et ce, jusqu’à la vague de suicides de salariés entre 2007 et 2010. A noter qu’Hélène Adam s’est portée partie civile pour que telles situations ne se reproduisent pas et par solidarité avec les familles des victimes.

Pour mémoire, le plan Next visait la mise en œuvre d’un grand programme de restructuration  dont le volet Rh « Act » prévoyait de réduire les effectifs  pour la période 2006-2008 avec 22 000 départs sur 120 000 salariés avec un plan de mobilité interne, externe et internationale pour les cadres. Ce plan qui avait engendré une dégradation des conditions de travail a donné lieu à plusieurs préavis de grève demandant l’abandon des méthodes  managériales mises en œuvre.

A suivre les débats à venir …

Pour en savoir plus :https://www.actuel-rh.fr/content/proces-france-telecom-deux-administrateurs-la-barre

 

 

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Procès France Telecom : réflexion  du cabinet Eléas sur les modes de management

Le contentieux pour harcèlement moral organisationnel  ouvert à l’encontre de France Télécom et de ses anciens dirigeants en lien avec une trentaine de suicides 2007 et 2009, a débuté le 6 mai devant le tribunal correctionnel de Paris. En raison de son ampleur, ses conséquences et de son impact médiatique, cette affaire a produit une forte prise de conscience au sein du monde du travail notamment lorsqu’il s’agit d’une démarche organisée au niveau de l’entreprise dans un contexte de stratégie de changement.

Face à un travail devenu source de souffrance susceptible d’entrainer des conséquences extrêmement graves, un grand nombre d’entreprises se sont emparées du sujet tant sur le plan de la santé au travail et sur celui de leur image. De nombreux travaux ont par ailleurs permis d’éclairer le sujet et d’impulser des démarches de prévention, facilitant la mesure du risque.

Dans ce contexte, le procès en cours incite à une réflexion sur les modes de management et à revisiter ses pratiques autour de l’exercice du pouvoir et la gestion des régulations, notamment  l’occasion des  réorganisations,  réorientations stratégiques,  mutations technologiques …

La question fondamentale est celle du changement, qui pour beaucoup de dirigeants est surtout un sujet de communication; or l’acceptation du changement passe par le vécu des personnes et leurs émotions. Ce qui suppose de prendre le temps de de faire un bilan du travail effectué et des conséquences à ne pas changer et les améliorations envisageables. Transformer radicalement et rapidement provoque une négation du passé, d’où l’importance de prévoir des périodes de transition pour faciliter la compréhension du changement et  des nouvelles contributions attendues. L’expérience montre qu’en voulant aller vite, on perd du temps en prenant des risques importants.

Tout ceci ne se résume pas à un sujet de réglementation ; les usages et la pratiques sur le terrain doivent évoluer au travers de la culture d’entreprise et du management. Il s’agit du fonctionnement organisationnel et relationnel dans les entreprises. Si, au cours des dernières années,  a été mise en avant la volonté de sécurisation juridique pour mettre en place des dispositifs de prévention,  l’enjeu pour l’avenir est tout autre: la nécessité pour les organisations  d’attirer et  fidéliser les personnes,   impliquant de proposer un cadre où les personnes se sentent bien dans le collectif de travail associant  reconnaissance, relations fluides avec le management, coopération…  Pour ce faire, des  marges de manœuvre doivent être laissées aux entreprises dans le choix des moyens à mettre en œuvre. Il est indispensable que l’engagement  vienne du plus haut de la hiérarchie, avec une prise de parole claire sur ce qui n’est pas acceptable et  que des sondages  QVT ou climat social donnent périodiquement la perception des salariés sur ces domaines.

Dans ce contexte, la  réflexion sur le management doit être générale ; critères de choix des managers, disponibilité, prise en compte des nouvelles attentes des salariés, impact du numérique, nécessité de passer d’un système de contrôle à un management  collaboratif et  relationnel. Le DRH est dans ce cadre garant de l’équilibre entre l’attention portée à l’individu et aux collectifs mais aussi à l’entreprise et ses impératifs. Cet équilibre est à rechercher via des diagnostics partagés, avec les élus, les managers et les service de santé au travail pour élaborer  des plans de prévention ou  programmes de QVT répondant  aux situations à traiter ; ce qui doit intégrer une politique de reconnaissance permettant au salarié de mieux cerner ce qu’est la valeur de sa contribution dans l’entreprise.  Cela suppose aussi de revoir la temporalité de l’entreprise en trouvant les moyens de réintroduire du temps long…

Pour en savoir plus :ttps://www.actuel-rh.fr/content/esperons-que-le-proces-amenera-une-reflexion-salutaire-sur-les-modes-de-management

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