Le point de vue de Philippe Martinez exprimé lors de la matinale de France Inter du 15 janvier 2018 à propos de 2 points d’actualité:
1– Le nouveau dispositif de rupture conventionnelle collective
*Sur le fond, la rupture conventionnelle collective donne aux entreprises l’opportunité non seulement de licencier à bon compte mais également de le faire dans le cadre de procédures très accélérées.
A souligner que ce projet ne figurait pas au programme annoncé par le Président de la République et qu’il est apparu tardivement au moment de la présentation par le gouvernement le 31 août 2017 des projets d’ordonnance réformant le code du travail.
A retenir cependant que lorsque le rapport de force existe, il peut peser comme l’illustre la récente initiative avortée du groupe Pimkie. Un tel contexte a le mérite de replacer dans le débat les données fondamentales notamment au regard de la situation réelle de l’entreprise et de sa stratégie. Ce qui permet de procéder à un examen approfondi pour trouver d’autres solutions que celle de départs affichés comme volontaires.
*Sur les populations seniors susceptibles d’être fragilisées par le nouveau dispositif, le risque est que les entreprises y trouvent une façon simple de se séparer de salariés âgés en leur faisant miroiter un chèque de départ et le bénéfice du chômage sans forte pression pour rechercher activement un emploi. C’est aussi pour les entreprises la possibilité de procéder à l’embauche de salariés jeunes disposant des compétences attendues à un coût beaucoup moins élevé; parfois aussi la voie pour revoir la nature des contrats de travail en privilégiant des formes précaires: contrat à durée déterminée, sous-traitance..
Pour l’ensemble de ces raisons, les syndicats ne peuvent être que vigilants face à une utilisation de ce nouveau dispositif et en toutes hypothèses peser sur les négociations susceptibles d’être engagées dans ce cadre.
2- La place des syndicats en 2018
*D’une manière générale, la volonté du gouvernement est clairement affichée de contourner le rôle des syndicats et d’ainsi contribuer à leur affaiblissement. Pour preuve les différentes mesures permettant de restreindre les règles impératives de droit social et d’ouvrir la possibilité de négocier hors de la présence d’interlocuteurs syndicaux.
*Le contexte de croissance de nouvelles formes d’emploi, notamment liées au développement de plateformes et de l’ubérisation amène les organisations syndicales à s’investir auprès des nouveaux travailleurs placés hors statut salarié. Les syndicats doivent démontrer leur capacité à répondre à ces besoins spécifiques qui sont importants. A titre d’exemple, les livreurs à vélo qui connaissent une grande précarité, doivent faire face à des contentieux de plus en plus nombreux. Le risque serait grand pour les syndicats, tant pour leur crédibilité que pour leur pérennité, de ne pas s’intéresser à ces populations fragilisées. Bénéficiant de la compétence technique et de l’expérience de la négociation, les syndicats ont leur rôle à jouer et doivent investir ce nouveau champ d’action avec ambition.
Pour en savoir plus : https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-8h20/l-invite-de-8h20-15-janvier-2018