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Apparence physique au travail : le Défenseur des droits interpelle les employeurs via une décision-cadre.

Questionnement autour du vêtement, de la coiffure, de la barbe, des tatouages, des piercings… ces points font l’objet d’une interpellation des employeurs sur leurs règlements intérieurs et leurs pratiques en dessinant la frontière entre ce qui est possible et ce qui est répréhensible. 

L’ apparence physique est devenue l’un des critères les plus fréquents de discrimination depuis ces deux dernières décennies rappelle le Défenseur des droits, dans une décision-cadre du 2 octobre 2019 qui constitue un vademecum invitant les employeurs à réinterroger les codes vestimentaires et de manière générale leurs pratiques, à la lumière du droit de la non-discrimination.

*tatouages et piercings : le Défenseur des droits demande aux employeurs de définir avec précision leurs exigences, sachant que des considérations générales liées à l’image de l’entreprise ou à l’obligation de dignité ne permettent pas de justifier des restrictions générales et absolues en ce domaine. Les tatouages discrets et non choquants devraient être tolérés dans le cadre professionnel pour les personnes en contact avec la clientèle ou les usagers du service public ; a priori, les postes sans contact avec la clientèle ne devraient pas être concernés par ce type de restriction. Des limitations restent possibles en lien avec les exigences du poste. Les tatouages comportant des images ou des messages violents ou offensants, racistes, antisémites, sexistes, contraires à la morale ou à l’ordre public peuvent être interdits sur le fondement de l’obligation de santé et de sécurité exigeant d’interdire la violence, le harcèlement et la discrimination ou encore sur le trouble à l’ordre public. Enfin, des considérations liées à la sécurité ou à l’hygiène peuvent conduire les employeurs à limiter ou interdire ces tatouages ou piercings, dans le respect du principe de nécessité et de proportionnalité.

* barbes : véritable phénomène de mode, l’évolution de la société conduit à une révision des codes professionnels. Des restrictions sont toutefois admises : exiger que la barbe soit soignée et entretenue reste possible. Ex : l’apparence physique d’un soignant mal rasé a été vue comme ne participant pas à l’image de la plus grande propreté corporelle requise par le règlement intérieur d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.  Le respect des consignes de sécurité peut être appliqué. Ex : est justifié le licenciement d’un salarié travaillant dans une société de démantèlement et de logistique nucléaire qui refuse de raser sa barbe, alors que le port de cette dernière empêche l’étanchéité du masque de sécurité. Mais le port de la barbe en lien avec des convictions religieuses est en principe protégé dans le secteur privé.

*grossophobie : le fait pour un employeur ou un collègue de tenir des propos vexants, dégradants, offensants ou humiliants en lien avec le surpoids des salariés relève de la qualification de faits de harcèlement discriminatoire à raison de l’apparence physique. Ce n’est que dans des circonstances exceptionnelles justifiées que des exigences liées au poids pourraient être admises. Ex : un employeur peut valablement licencier une danseuse du Moulin rouge qui ne répondait plus aux exigences physiques et esthétiques lui permettant de poursuivre la relation de travail après 11 ans d’absence suite à des congés parentaux.

*Tenues vestimentaires et coiffure : si l’effacement progressif des frontières entre les sphères privée et professionnelle autorise plus de liberté, certaines restrictions demeurent possibles. Ex : un employeur peut exiger le port d’une tenue de travail destinée à protéger le salarié contre l’utilisation de produits ou d’outils dangereux si cette obligation est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. De même, si de simples négligences vestimentaires ne peuvent pas justifier un licenciement, l’employeur est a priori en droit d’exiger que ses salariés en contact avec le public soient coiffés et habillés de manière convenable.
Un employeur peut interdire le port de tenues considérées comme indécentes susceptibles de créer un trouble dans l’entreprise ou de choquer la clientèle. Ex : est justifié le licenciement d’une salariée qui se déplaçait dans l’entreprise vêtue d’un chemisier transparent sans soutien-gorge.
En matière de coiffure, le non-respect des mesures d’hygiène corporelle, tel qu’avoir des cheveux propres, les attacher ou porter une charlotte de protection, notamment lorsque les salariés ou les agents publics sont en contact avec des denrées alimentaires ou travaillent dans le secteur médical, peut valablement justifier des sanctions. Pour le reste, les restrictions posées par les employeurs concernant la coiffure de leurs salariés doivent être appréciées in concreto en fonction des postes occupés et au regard de l’évolution de la société.

Pour en savoir plus : Décision-cadre du Défenseur des droits n° 2019-205 du 2-10-2019

https://www.efl.fr/actualites/social/cessation-du-contrat-de-travail/details.html?ref=f2d9b532b-6cd8-4e9b-8f67-f228e76f8816&eflNetwaveEmail

 

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Apparence physique au travail : Décision-cadre du Défenseur des Droits    

Le Défenseur des Droits a publié le 15 octobre 2019 une décision-cadre relative aux restrictions liées à l’apparence physique des salariés en matière de style vestimentaire, barbe, coiffure, tatouages…   Cette décision reprenant les droits et devoirs des entreprises en matière de non-discrimination, a été remis aux ministres du travail, de l’action et des comptes publics, de la santé et des armées, ainsi qu’aux diverses organisations régionales, patronales et syndicales.

Le document comporte  5 annexes concernant : poids, tenue vestimentaire, barbe, coiffure, tatouages et piercings qui  incitent les employeurs  à revoir leurs pratiques à la lumière de la non-discrimination.

des codes vestimentaires peuvent être imposés, s’ils sont  en adéquation avec  les exigences liées à la sécurité ou l’hygiène précisément justifiées.   Exemples :

*une tenue de travail liée à l’utilisation de produits ou outils dangereux, contact avec les aliments, *une coiffure particulière : cheveux attachés pour raisons de sécurité, filet à cheveux…

* l’absence de pilosité faciale si elle est incompatible avec le port d’un masque de sécurité.

Les autres restrictions sont difficiles à justifier : les codes vestimentaires répondant à des considérations d’image ne sont a priori pas justifiés pour des métiers sans aucun contact avec la clientèle. Idem pour des postes en contact avec le public, la restriction doit être proportionnée. Exemples : *un règlement intérieur interdisant  aux ambulanciers de porter jean/baskets et  obligeant à porter une cravate a ainsi été jugé disproportionné par la Cour de cassation. * Une cour d’appel (2008) a considéré qu’on ne pouvait reprocher à une cadre de s’être présentée chez un client en jeans et bottes, alors qu’une telle tenue n’est, en elle-même, de nos jours et dans un tel contexte, en rien incongrue ni déplacée.

La barbe est également un symbole de l’évolution des codes dans les entreprises =  78 % des hommes de moins de 35 ans porteraient la barbe, selon un sondage Opinionway réalisé en 2018. Exemple : la barbe interdite depuis 1974 dans la police ‘a été autorisée en 2015, suite à négociation avec les syndicats.

Exiger des salariés qu’ils se rasent la barbe, sauf motif particulier lié à la sécurité, est abusif mais  l’entreprise peut valablement exiger que la barbe s’intègre à une apparence soignée. Exemple : Rejet en 2019 par le Défenseur des droits de la réclamation d’un candidat à un poste d’animateur de vente en téléphonie mobile en contact avec la clientèle. L’entreprise exigeait qu’il taille sa barbe « imposante et non-taillée » au regard de l’image de marque de la société

-Même approche pour la coiffure, sachant qu’actuellement seules les sanctions visant les salariés porteurs de coiffures excentriques ont été admises par les juges. Exemples : *un employé de banque ayant la tête rasée sur les côtés et surmontée d’une crête jaune centrale gominée, sommé d’adopter une coiffure plus discrète ; * idem pour un informaticien portant une coupe à l’iroquoise.

A noter que l’évolution de la société  restreint le pouvoir de l’employeur : le port de cheveux longs par les hommes est dans les codes esthétiques actuels et les juges prennent  en compte ces évolutions.  Exemple: jugé qu’un attaché commercial ne peut se voir refuser une promotion du fait qu’il refuse de couper sa queue de cheval.

A souligner que sur les différences de traitement entre hommes et femmes concernant le port de cheveux longs (ex : police nationale, compagnies aériennes) ou de boucles d’oreilles n’ont pas encore  été reconnus comme discriminatoires en raison du sexe.

les tatouages discrets et non choquants devraient être tolérés dans le cadre professionnel pour des postes en contact avec la clientèle ; a fortiori, les postes dénués de contact avec le public ne devraient pas se voir imposer de restriction. Pour les piercings, les juges  reconnaissent régulièrement comme abusifs les licenciements fondés sur le refus d’ôter ce type de bijoux : l’employeur peut cependant  justifier son interdiction, en raison des exigences du poste

A retenir :

*pour formuler des restrictions liées à l’apparence de ses salariés, seules des exigences écrites et motivées par des considérations précises et justifiées sont  valables.

*recommandation aux entreprises de former leur personnel aux droits et libertés des salariés, tout en associant les partenaires sociaux à la mise en oeuvre effective de l’ensemble des mesures.

*la décision-cadre du Défenseur des droits s’inscrit dans une démarche de sensibilisation des acteurs de l’emploi à la discrimination en entreprise : cf  guide  publié en juin 2019 « Pour un recrutement sans discrimination ».

Pour en savoir plus :

 

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